Monsieur le Maire,
Mes collègues ont déjà longuement évoqué les travers de votre trajectoire budgétaire, aussi je serai plus concis.
Et peut-être également un peu plus positif. Car aussi catastrophique que soit la situation de la ville, elle peut encore être corrigée.
Bien sûr, ceux qui récupéreront les manettes de la ville en 2026 après votre passage hériteront de la dette la plus haute que l’on ait jamais atteinte, qui pèse comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête des Grenoblois. Ils hériteront de dépenses de fonctionnement étouffantes qui oblitèrent les capacités d’investissement de la collectivité. Et d’un taux d’imposition record qui pénalise déjà grandement les contribuables.
Ils auront alors deux solutions. Soit s’inspirer de vos méthodes et persister sur la pente de la facilité et de la lâcheté. Mais cette voie là ne durera qu’un temps très court, car l’endettement de la ville atteindrait vite les seuils ouvrant l’éventualité d’une mise sous tutelle, car il n’y aura plus de bijoux de familles à vendre, car l’impôt déjà plus élevé que n’importe quelle autre grande ville ne pourra pas encore être augmenté beaucoup plus.
Soit, et c’est ce que nous proposons inlassablement depuis les élections municipales de 2020, ils feront le choix beaucoup plus durable des réformes structurelles.
Sur les bancs des oppositions nous avons tous été unanimes pour dénoncer votre hausse d’impôts, même si certains nous ayant rejoint en cours de route ont voté pour. Tout comme nous sommes unanimes dans notre opposition à la braderie de Grenoble-Habitat à un opérateur privé.
Mais nous sommes le seul groupe, depuis le début, à dépasser le stade du constat et la simple critique pour proposer des alternatives. Car c’est bien beau de refuser des recettes de plusieurs millions d’euros via l’impôt et la vente des bijoux de famille, mais encore faut-il expliquer ce qu’on met en face pour compenser.
Et pour cela, il faut le courage de sortir de la facilité d’une opposition purement politicienne pour explorer des pistes d’économies durables. Nous l’avons fait au moment du vote du budget, en proposant une dizaine d’amendements pour éviter la hausse d’impôts. Nous avons poursuivi dans cette logique lors du dernier conseil, en proposant un peu plus de 4 millions d’économies ici et là pendant que tous vous avalisiez cette poursuite folle de la dépense dans une collectivité qui explose les plafonds des coûts de fonctionnement.
En réalité, en s’attaquant à trois axes, les trois mêmes que nous défendons depuis le début, nous pouvons remettre le bateau Grenoble à flot.
- 1er axe, celui des dépenses de fonctionnement, bien plus élevées que la moyenne des villes de la même strate ce qui invalide d’ores et déjà les justifications faciles qui consistent à se réfugier derrière le contexte national, le COVID, l’Ukraine, l’inflation etc. Un audit précis des services est nécessaire pour dénicher des pistes d’économies, car elles existent indéniablement. L’ADES aime à rappeler que sous les mandats d’Alain Carignon, la masse salariale était près de 20 points moins élevées que désormais. Et pourtant, le niveau de service rendu s’est dégradé depuis comme chacun peut le constater en se baladant simplement en ville. La quantité ne fait jamais la qualité.
- 2ème axe, celui de la mutualisation avec la Métropole. Il est invraisemblable que nous ayons manqué à ce point le rendez-vous de la métropolisation. Non seulement nous avons créé des postes supplémentaires malgré le transfert de compétences et la métropole en a également créé en plus de ceux récupérés aux communes. Mais nous assistons depuis votre guerre d’égo avec Christophe Ferrari à un recul clair et net, avec la reprise du pouvoir de police sur la voirie en début de mandat, maintenant la volonté métropolitaine de reprendre le service des arbres que vous avez si mal géré…
- 3ème axe, celui d’une gestion raisonnée du patrimoine de la ville. C’est-à-dire utiliser les locaux vides pour le personnel plutôt que d’engager de coûteuses opérations d’acquisitions et rénovations de siège. Vendre ceux dont la collectivité n’a plus l’utilité. Et ouvrir des appels d’offres très larges pour la gestion des équipements qui nous coûtent en fonctionnement et pour lesquels nous n’avons pas les moyens d’investir. Je pense par exemple au palais des sports et à l’ancien musée de peinture qui nécessitent à eux deux 70 millions d’euros dont nous n’avons évidemment par le premier centime.
Il n’appartient qu’à vous d’engager ce travail, car plus nous attendrons, plus les mesures à prendre s’avéreront drastiques.
Bien sûr nous serions ravis de vous proposer des pistes encore plus précises. Mais il faudrait pour cela que vous daigniez nous fournir l’organigramme détaillé service par service que nous réclamons en vain depuis le début de mandat. Il faudrait que vous soyez plus transparent sur le patrimoine de la ville, en nous fournissant l’inventaire exhaustif des locaux et propriétés municipales, de leur utilisation et de ce qu’ils coûtent à la ville. Il faudrait enfin, et c’est sûrement le plus compliqué, que vous appreniez à ranger votre égo mal placé pour rétablir des relations sereines avec la métropole.
Nous avons peu d’espoir que vous accédiez à nos demandes, car on a bien compris que vous ne changerez pas, que votre fonctionnement est ainsi fait que toute ouverture à ce qui n’émane pas de vous est impossible.
Pourtant nous allons vous proposer une modeste avancée pour un sujet à propos duquel nous pensons sincèrement que nous pouvons nous retrouver. Celui de la rénovation énergétique, enjeu essentiel qui touche tant à la transition écologique qu’à une problématique sociale, et pour lequel nous avons toujours salué les décisions allant dans le sens d’une accélération des rénovations même si en la matière nous pourrions faire beaucoup mieux et aller beaucoup plus vite.
Pour ce faire justement, vous avez la possibilité de rectifier le frein à la rénovation que vous avez créé en augmentant la taxe foncière, ce qui décourage forcément les propriétaires de logements d’engager des travaux.
La loi autorise en effet les communes, sur décision du conseil municipal, à voter une disposition visant à exonérer de taxe foncière pendant trois ans les propriétaires de logement qui engagent de tels travaux. Plus de 450 communes ont déjà voté ce dispositif d’exonération.
Grenoble pourrait tout à fait rejoindre la liste et faire non seulement un geste pour les propriétaires, mais aussi pour les locataires dans le cas d’un propriétaire bailleur engageant ces travaux, et pour la planète avec cette incitation forte à rénover.
D’autant plus que cela n’engendrerait pas de coût supplémentaire pour les finances de la ville. Vous avez budgété 1 million d’euros pour, je cite, une « aide pour les personnes modestes » en contrepartie de l’augmentation de taxe foncière. Or, votre adjoint a avoué dans la presse que sur ces 1 million, seuls 15 000 euros ont été mobilisés pour une vingtaine de personnes.
Nous pourrions donc avoir recours à cette enveloppe déjà budgétée sans difficultés pour financer une exonération de taxe foncière.
Aussi, pour alléger le matraquage des contribuables et accélérer la rénovation énergétique, nous vous proposons d’amender la décision modificative comme suit :
“Les propriétaires bailleurs ou occupants d’un logement achevé avant le 1er janvier 1989, effectuant des travaux en vue de réaliser des économies d’énergie, se verront exonérer du paiement de la taxe foncière pour les trois années suivant celle du paiement du montant total des dépenses et du dépôt de la demande d’exonération.
Les dépenses engagées pour les travaux devront être supérieures à 10 000 € TTC hors main-d’œuvre au cours de l’année qui précède la première année d’application de l’exonération. Si elles ont été payées au cours des 3 années précédant l’année d’application, le montant devra être supérieur à 15 000 € TTC”.