Monsieur le Maire,
Ce vote est un moment important et douloureux de l’histoire de Grenoble. Il est la démonstration de la fausseté de vos déclarations aux Grenoblois en 2016, quand vous avez imposé votre plan d’austérité pour soi disant éviter à Grenoble d’être mis sous tutelle. Car aujourd’hui, en 2023, l’un de vos conseillers, Monsieur Picollet, a révélé qu’il fallait déjà 17 % d’augmentation des impôts pour éviter la tutelle, c’est-à-dire la faillite. Vous volez de tutelle en tutelle et la prochaine est renvoyée à l’aube du prochain mandat.
Car ce que nous vous reprochons, au-delà des chiffres que tout le monde connaît maintenant, c’est le fait que cette augmentation massive d’impôts, cette saignée des Grenoblois ne résout rien. C’est la faute la plus grave et vous le savez. Avec cette courbe de dépenses de fonctionnement, avec ce stock d’endettement incompressible et dangereux, les mêmes causes vont produire les mêmes effets.
8 ans après les 10 % d’augmentation d’impôts de la municipalité Destot de 2008, en 2016, la ville était à nouveau exsangue.
7 ans après votre plan de rigueur de 2016, la ville est à nouveau exsangue de façon encore plus dramatique en 2023.
4 ans après les 30 % d’impôts de 2023, pour son budget 2027, tous les clignotants seront au rouge.
L’augmentation massive des dépenses de fonctionnement de cette année, 41 millions d’euros, induit les augmentations massives des années suivantes. Elles sont récurrentes. Pas de budget base zéro avec les services, pas de restructuration, pas de mutualisation avec la Métropole, pas de délégation de service public pour le patrimoine qui s’écroule. L’effort monstrueux que vous demandez aux Grenoblois va être absorbé en une poignée d’années, il ne sert à rien.
Dès 2020, lors des élections municipales, notre équipe avait averti : il faut un big bang, il faut réorienter la dépense publique, créer des synergies. C’est vrai que nous n’avons pas été entendus par les Grenoblois qui ont préféré écouter votre discours de facilité, incantatoire, ne s’attardant pas sur les moyens. C’est notre honneur de n’avoir pas menti et c’est notre force aujourd’hui pour préparer l’avenir.
Je pense qu’au vu de ce qui leur arrive, les Grenoblois peuvent entendre un discours de vérité. Certes, demain sera encore plus difficile qu’aujourd’hui puisque vous aurez en même temps vendu tous les bijoux de famille de la ville, GEG, la compagnie de Chauffage, Grenoble Habitat, engrangé 78 millions d’euros de recettes exceptionnelles parties en fumée. Les Grenoblois ne les retrouveront pas. Ils sont définitivement perdus.
Pour comprendre la gabegie, les exemples ne manquent pas.
Par exemple, les locaux vides. Tout le monde sait qu’un bien qui n’est pas occupé se dégrade, ne rapporte rien, il est une perte financière annuelle. La municipalité dispose de la cité de l’Abbaye, vide, en parallèle elle a décidé d’acquérir le siège du Crédit Agricole et de le mettre aux normes pour un montant total de 10 à 15 millions d’euros (8 millions d’acquisition et de l’ordre de 5 millions pour les travaux), elle subventionne la SEM pour financer l’Abbaye, puis le déficit de l’opération future et en parallèle elle crée un service supplémentaire chargé de l’urbanisme transitoire avec du personnel affecté !
Si elle avait consacré la moitié de la somme qu’elle a consacré au siège du Crédit Agricole à rénover l’abbaye en bureaux, elle aurait économisé au bas mot 5 à 10 millions, ainsi que le fonctionnement de la SEM, le déficit de la Sem pour l’opération, économisé la création d’un service municipal dédié et économisé la dégradation des locaux logements .
En imposant son urbanisme ultra dense avec de l’ordre de 50 % de logements sociaux elle aboutit à des déficits d’opérations considérables. Cette année nous versons 3 millions d’euros pour la ZAC presqu’île, 2,6 millions d’euros pour Flaubert, alors qu’avec un urbanisme plus équilibré il est possible de faire supporter plus aux opérateurs privés. Ce sont des opérations très coûteuses pour le budget qui ne vont aucunement faire le bonheur ni la prospérité des habitants comme on le constate pour chacune des opérations réalisées.
La même logique avec l’ANRU. On le voit à ce Conseil Municipal avec les 1,5 millions d’euros que nous votons pour accompagner les rénovations au Village Olympique qui en a bien besoin. Le résultat sera le même qu’à l’Arlequin. S’occuper des murs ne change rien derrière les façades. Alors qu’au contraire la ville aurait l’opportunité de faire financer par l’ANRU des opérations d’implantation de services municipaux afin de rééquilibrer et revaloriser des quartiers, et en libérant des locaux actuels de ses services de dégager des recettes nouvelles importantes de leur vente.
Je n’évoque là qu’à grands traits quelques orientations permettant de sortir de l’ornière, mais nous tenons à le faire car les Grenoblois ne doivent pas penser que l’horizon de la ville est définitivement obstrué, que plus rien ne sera possible. Nous tenons à le faire parce que nous ne voulons pas nous réfugier dans la grossièreté et l’incantation comme vous le faites au plan national. Oui, chaque année supplémentaire dans la mauvaise direction rend plus lourdes et difficiles les solutions. Mais elles existent et avec du courage et de l’expérience nous pourrons les explorer demain avec tous les Grenoblois.
Nous ne disposons pas de l’organigramme municipal que vous nous refusez et que réclame régulièrement Nicolas Pinel en notre nom. Il nous est donc difficile d’analyser l’organisation interne de la ville, mais tout ce que nous constatons de l’extérieur démontre qu’il n’y a pas de pilote dans l’avion, c’est-à-dire un chef de l’administration municipale qui fait valoir une logique de services rendus sur une logique d’accumulation bureaucratique.
Quand nous disons qu’il faut un big bang, une autre vision, un engagement de l’équipe municipale et du Maire pour rechercher inlassablement les synergies qui permettent de mieux valoriser l’argent public, d’améliorer vraiment la vie des habitants, de tous les habitants, de rééquilibrer la ville, de donner sa chance à tous, nous sommes totalement sincères.
Vous conduisez Grenoble droit dans le mur. Le mur de l’impôt, le mur de la dette et le mur de l’asphyxie du fonctionnement.
Je crois que vous le savez.
Nous ne désespérons jamais et nous allons tenter dans un esprit positif d’infléchir la tendance, de réduire l’augmentation d’impôts par des amendements présentés par les Conseillers Municipaux de notre groupe qui vous donnent une chance de limiter les dégâts. Contrairement à vous à l’Assemblée Nationale, par respect des Grenoblois, par respect de la démocratie et du débat, nous ne pratiquons pas l’obstruction, la répétition, l’invective, également parce que la gravité du moment de bascule pour la ville qui entre dans une zone de tempête financière, implique de garder son sang-froid.
Aujourd’hui et surtout demain il faudra éviter l’iceberg au Titanic que vous pilotez jusqu’en 2026. Comme vous arrivez à mi-mandat, c’est le moment que nous choisissons pour commencer à tracer des perspectives d’avenir, nous voulons engager le débat sur cet avenir avec tous ceux qui le désirent dans l’opposition et surtout avec les Grenoblois.
Car il ne suffit pas de dire que la voie que vous avez choisi est une impasse, ce que de plus en plus de Grenoblois constatent, il faut tracer avec toutes les volontés de la ville, un autre chemin pour Grenoble.
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Présentation de l’amendement suivant :
Afin d’accélérer la rénovation énergétique des logements grenoblois, le Conseil Municipal décide :
- d’exonérer du paiement de la taxe foncière pour une durée de 2 ans les propriétaires occupants qui engagent des travaux de rénovation améliorant la performance énergétique de leur logement.
- d’exonérer du paiement de la taxe foncière pour une durée de 3 ans les propriétaires bailleurs qui engagent des travaux de rénovation améliorant la performance énergétique de leur logement.
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Le débat vient de démontrer que vous ne voulez rien entendre, rien écouter. De personne. Même les oppositions et les réticences dans votre propre majorité ne vous incitent pas à la réflexion. Aucune de nos propositions n’est recevable. Tous les groupes du Conseil Municipal qui vous alertent sont donc dans l’erreur.
Pourtant la trajectoire financière de la ville ne peut pas vous échapper. Elle n’a visiblement pas échappé à votre précédent Adjoint aux Finances, Monsieur Sabri, qui a préféré honnêtement rendre son tablier plutôt que de défendre l’indéfendable, ce que l’inamovible Vincent Fristot accepte de faire, on sait au nom de qui, de quelle idéologie qui fait tant de mal à Grenoble.
Au-delà des chiffres, ce qui nous frappe c’est votre désinvolture car sachez que personne ne croit que vous allez “accélérer les transitions” en augmentant les impôts de 30 %. Car beaucoup de dépenses inconsidérées sont de votre responsabilité. Prenez l’incendie de Richardson pour lequel vous avez déjà inscrit 6 millions d’euros de provisions qui ne seront peut être pas suffisants ; voilà 6 millions d’euros vraiment partis en fumée. Sur 44 millions de recettes fiscales, 6 millions ce n’est pas négligeable.
Si vous aviez géré le camp de roms sur le terrain de la ville qui jouxte l’entreprise Richardson comme nous vous le demandions, les Grenoblois n’auraient pas à payer la note.
Si vous acceptiez de mettre des actions pour lutter contre l’insécurité, notre ville redeviendrait assurable, car elle ne l’est plus de fait du fait de son niveau de sinistralité ce qui fait que des catastrophes comme celles de Richardson ou de l’incendie criminel de la salle du Conseil Municipal pèsent essentiellement sur le contribuable.
On peut ajouter votre refus de dialogue qui induit pour 150 000 € de frais d’avocats et de procédures, 500 000 € de provisions pour la seule procédure contre le restaurant du 5, les locaux vides de la ville ou de la Métropole sur notre territoire, 88 rue des Alliés, place des Géants, 14 Bâtiments à l’Abbaye je l’ai dit, Prémalliance Avenue Reynoard, l’ex caisse d’épargne chemin de la Poterne, des milliers de mètres carrés donc, qui coûtent au lieu de rapporter. Il y a là disponibles, dans cette gabegie de gestion, une vingtaine de millions d’euros de recettes et d’économies potentielles. Elles sont sous vos yeux.
On ne le dira jamais assez, vous augmentez les impôts au moment où vous engrangez les recettes du siècle. Vous vendez tout, vous bradez tout ce qui a été accumulé par la sueur des Grenoblois parfois depuis 100 ans.
Il faut bien que les Grenoblois comprennent que les dépenses auxquelles vous avez à faire face, la hausse des fluides, l’inflation, l’évolution du point d’indice que vous devriez normalement prévoir, ça représente 5 fois moins que le montant des recettes exceptionnelles perçues par la vente de GEG, de la Compagnie de Chauffage et Grenoble Habitat pour un total de 78 millions d’euros. Certaines recettes sont étalées dans le temps mais la seule vente de Grenoble-Habitat représente plus du double de ce que vous chiffrez en dépenses dites exceptionnelles.
Dans une gestion correcte, ces seules ventes auraient dû permettre de ne pas relever les taux d’impôts et de commencer le désendettement. Quand on compare la réalité de votre gestion et vos postures prédictives on est effarés, accablés.
Je sais bien, on me le répète assez, que le rationnel a disparu et qu’il faut seulement parler à l’émotion, que l’opinion est ainsi emballée et n’y voit que du bleu, mais je suis profondément convaincu que la vérité bête, que le réel feront leur retour un jour ou l’autre, comme toujours, et que ce que nous voyons là, dans vos décisions, dans ces chiffres accablants, dans ce laisser aller, ce laisser faire coupable, redeviendra visible, redeviendra le centre du débat, parce qu’avec vos décisions la ville sera à nouveau inéluctablement le dos au mur.
En présentant nos amendements nous avons voulu poser des jalons d’une gestion future de la ville qui dégage à nouveau des marges d’action pour les défis écologiques, de solidarité, de qualité de vie, de sécurité, d’attractivité du territoire, autant de défis auxquels vous ne pouvez plus répondre.
A mi-mandat il s’agit à la fois de dire la vérité aux Grenoblois comme nous l’avons fait lors des élections municipales de 2020 quand nous affirmions que sans big bang de l’organisation municipale, dans le scepticisme ou le ricanement, la municipalité ne saurait faire que de l’impôt et de la dette.
En même temps de leur donner un espoir, pour réduire la fuite de la classe moyenne, rassurer les captifs des quartiers qui ne peuvent en partir, les propriétaires spoliés par la chute de la valeur de leurs biens, les retraités qui ne peuvent pas supporter cette nouvelle charge d’impôts, les familles modestes qui attendent la solidarité pour eux, l’apport d’une éducation populaire active pour leurs enfants, les commerçants, les artisans, les professions libérales qui veulent travailler et veulent que la ville-centre demeure attractive… Bref, tout ce qui fait la cité et que vos décisions, en particulier ce matraquage d’impôts, remettent fondamentalement en cause.